Un jour dans la vie d’une sage-femme dans un camp de réfugiés en Ouganda

L’Ouganda est l’un des pays dans le monde hébergeant le plus de réfugiés. Actuellement, cette terre d’accueil reçoit près de 2 000 personnes en moyenne, mais ce nombre pourrait atteindre un nouveau sommet à tout moment. Le camp de réfugiés Imvepi sert de refuge à plus de 110 000 personnes, ce qui représente trois fois le nombre de personnes locales de la communauté. Sur les 1,2 million de réfugiés en Ouganda, 900 000 sont des Sud-Soudanais. De ce nombre, 86 % sont des femmes et des enfants qui sont réellement en danger de subir des violences sexuelles et physiques. Plusieurs d’entre eux ont d’ailleurs vécu des actes de violence lors de leur trajet vers le camp. CARE a établi cinq centres à Imvepi où des femmes et des filles réfugiées peuvent trouver de l’aide et où des victimes de violences sexuelles peuvent recevoir du soutien psychosocial et des services médicaux.

Mary Maturu, qui œuvre dans l’un des centres pour femmes de CARE, donne un aperçu de son travail de sage-femme dans l’un des plus grands camps de réfugiés au monde.

Mary Maturu works in one of CARE’s women

6 h

Ma journée commence tôt le matin. Après m’être préparée, je fais de la nourriture pour mon fils. Il a trois ans, et c’est ma sœur qui prend soin de lui quand je suis au travail. Je révise rapidement les notes que j’ai prises la veille sur ce que je veux dire aux femmes que je rencontrerai dans ma journée. Les sujets que j’aborde peuvent aller de la santé reproductive à la violence sexiste et aux soins prénataux. Après mon déjeuner, je me rends au centre des femmes du camp Imvepi. De chez moi, le trajet de marche me prend 30 minutes.

8 h

Une fois arrivée au centre des femmes d’Imvepi, j’organise et détermine les activités de ma journée. Je discute normalement de mes plans avec l’une de mes bénévoles communautaires, Faiza, qui fait équipe avec moi. Faiza, qui a fui le Soudan du Sud, apporte une aide incroyable aux communautés de réfugiés ici et me suggère souvent des sujets à traiter. Je prépare ensuite mon bureau de consultation. C’est là que je vais évaluer les patients et poser des diagnostics, ce qui me permettra de diriger les cas graves vers les dispensaires. Je vais aussi offrir des soins prénataux aux femmes enceintes et vérifier si elles présentent des complications prénatales. Notre centre est à proximité de l’endroit où les nouvelles réfugiées arrivent et attendent d’être enregistrées. Nous ne perdons jamais de temps pour identifier les réfugiées enceintes qui ont besoin de services de santé maternelle. Nous les informons sur les façons d’avoir accès aux services médicaux pour elles et leurs bébés à naître. Dans le temps de le dire, je me retrouve souvent entourée de 20 à 30 femmes enceintes et allaitantes.

9 h

Pour plusieurs femmes, notre centre est vraiment éloigné du lieu où se trouvent leurs abris. C’est que le camp d’Imvepi est très vaste; il couvre une région de 150 km2. Souvent, je vais faire des visites à domicile dans les communautés. Chaque jour, nous couvrons des sujets différents. Il y a quelques semaines, nous avons parlé de la planification familiale. Plusieurs des femmes qui arrivent à Imvepi sont profondément traumatisées d’avoir perdu des membres de leur famille. La planification familiale n’est donc pas leur priorité, mais nous leur en rappelons toute l’importance, surtout depuis que nous avons constaté de nombreuses grossesses non désirées dans le camp. Certaines fois, nous discutons de santé avec des mères souffrant de malnutrition sévère ou séropositives pour le VIH. Nous devons aussi souvent aborder une autre réalité malheureuse et hautement importante, soit la violence sexuelle et sexiste. C’est une problématique qui touche de nombreuses familles. On nous informe souvent de cas où les pénuries alimentaires ont des impacts physiques plus que préoccupants. Plusieurs familles n’ont d’autre choix que de vendre les rations de nourriture qu’elles reçoivent, ce qui les laisse le ventre vide. Certains hommes échangent aussi leurs denrées contre de l’alcool qui, en fin de compte, génère de la violence dans le foyer. J’essaie de repérer les femmes qui ont besoin d’une aide immédiate ou de ressources quelconques.

Mary Maturu works in one of CARE’s women

14 h

Il est temps pour moi de retourner au centre des femmes. Entre le matin et le début de l’après-midi, j’essaie de voir le plus de femmes possible là où elles vivent. Parfois, mes visites avec elles s’étirent et je dois répondre à une multitude de questions, ce qui ne me laisse pas une minute pour manger. Beaucoup de femmes me disent qu’elles préfèrent que je leur montre comment pêcher plutôt que de recevoir de l’aide alimentaire. C’est aussi ce que nous tentons de faire au centre des femmes. Nous informons et formons les femmes afin qu’elles puissent démarrer quelque chose par elles-mêmes, comme une petite culture ou un petit commerce, ce qui leur donne une indépendance.

Je consacre le reste de l’après-midi à rencontrer d’autres femmes au centre. Certaines mères viennent me voir parce qu’elles n’arrivent pas à installer leurs tentes toutes seules. CARE a aidé plus de 2 500 réfugiées vulnérables à se bâtir un nouveau foyer à Imvepi. Dans une journée, je vois habituellement de 80 à 100 personnes, dont la plupart sont des femmes enceintes. Comme la plupart d’entre elles n’ont jamais vu un médecin de leur vie, je m’assure de leur parler de l’importance d’accoucher à l’hôpital. Mais ça représente tout un défi. Les mères réfugiées vivent souvent loin d’un dispensaire et n’ont aucun moyen de s’y rendre. Les hôpitaux sont aussi souvent bondés. Ils manquent d’équipements et d’espace. Les patientes doivent souvent partager le peu de matériel médical qui s’y trouve.

17 h

À cette heure-là, je commence généralement à ranger mes choses et à retourner chez moi avant la noirceur. En marchant, je réfléchis à ce que les gens m’ont confié. Certaines histoires de vie sont bouleversantes, surtout celles où des enfants sont laissés seuls, sans supervision et sans soins. Je récupère mon fils chez ma sœur et lui donne un grand câlin en remerciant le ciel pour tout ce que j’ai. Nous soupons et, ensuite, je le mets au lit et je prépare ma journée du lendemain.

23 h

C’est l’heure d’aller me coucher afin d’être bien reposée pour entamer une autre bonne journée. Je me sens choyée d’avoir un emploi qui me permet d’aider des gens à mieux vivre. J’aime parler à ceux qui ont besoin d’aide et écouter leurs témoignages. J’ai toujours souhaité devenir une sage-femme, et même si j’ai toujours plus de travail à Imvepi que je ne peux en faire, je sais que je fais une différence dans la vie de centaines de mères.


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