ELLE AUSSI mérite d’échapper aux mauvais traitements, surtout à l’accouchement

Par Rebecca Davidson de CARE Canada

Devenir mère pour la première fois, c’est une expérience pleine d’euphorie et d’émerveillement qui s’imprègne dans la mémoire. Je parle en connaissance de cause, puisque j’ai accouché de Leo, 5 ans, et de Sadie, 2 ans. Mettre au monde un enfant, ça peut aussi être un moment qui fait vivre de l’anxiété et des doutes. Là encore, je le sais, car j’ai eu des complications à mes deux accouchements. Dans certaines régions du monde, accoucher c’est littéralement traumatisant.

CARE maternal health care project in Tanzania

Chaque jour, plus de 800 femmes meurent pendant leur grossesse ou leur accouchement, dont 99 % dans des pays en développement. Beaucoup de ces décès pourraient être évités si les femmes avaient accès à des services de santé sexuelle, reproductive et maternelle de qualité.

En tant que responsable du projet TAMANI de CARE en Tanzanie, je travaille avec nos partenaires dans l’une des régions les plus pauvres du pays pour aider à garantir l’accès à des soins de santé de qualité pour les femmes et les filles. C’est à la fois simple et difficile d’améliorer l’accès aux soins de santé. En nous basant sur des données, des études de cas et des expériences, nous savons ce qui peut sauver le plus de vies au moment de l’accouchement. Là où c’est plus ardu, c’est quand vient le temps d’améliorer l’accès aux soins de santé. Il faut comprendre qu’il existe tout un contexte local qui empêche les femmes et les filles de chercher et de recevoir les soins dont elles ont besoin.

Lors de ma récente visite en Tanzanie, j’ai été frappée par les histoires de peur et de maltraitance qui se déroulent dans les établissements de santé – en particulier pour les jeunes mères qui, en raison de leur âge, risquent davantage d’avoir des complications graves.

Une jeune fille de 16 ans nous a fait cette confidence :

J’ai vu une femme être malmenée par des personnes qui devaient s’occuper d’elle. Elles l’ont insultée parce qu’elle avait accouché par terre. Mais ce n’était pas de sa faute. La femme avait appelé l’infirmière plusieurs fois, sans réponse. L’infirmière l’a injuriée, lui reprochant d’avoir sali le sol. Je pense que ce mauvais traitement fait peur aux filles et leur fait redouter d’accoucher dans un centre de santé parce qu’elles ne veulent pas vivre une expérience comme celle-là.

Il y a peu de chances que cette jeune femme reçoive des soins dans un établissement de santé si jamais elle en a besoin. Pourquoi? Parce qu’elle vit dans une région où plus de 43 % des filles de 15 à 19 ans sont enceintes ou déjà mères, ce qui représente le taux le plus élevé de grossesses en Tanzanie.

CARE's Rebecca Davidson visiting maternal health projects in Tanzania

CARE croit que chaque femme a le droit de vivre une expérience de maternité sans risques et sans abus – tant pour elle que pour son bébé. Le 11 avril, à l’occasion de la Journée internationale de la santé et des droits maternels, soyons solidaires des femmes et des filles. Exigeons que les droits universels des femmes en âge de procréer soient respectés.

La Charte sur le respect dans les soins de maternité lancée par l’Alliance du ruban blanc lors de consultations mondiales est un cadre fondé sur les droits qui s’appuie sur les déclarations existantes, les conventions internationales, les lois nationales et les chartes des patients. Elle sert de base aux engagements politiques ainsi qu’à une sensibilisation mondiale visant à s’attaquer au problème du manque de respect et des mauvais traitements envers les femmes ayant besoin de soins de maternité.

Au cœur de la Charte sur le respect dans les soins de maternité se trouve le droit de vivre une maternité à moindre risque, sans violation des droits civils fondamentaux des femmes. Nous avons entendu les témoignages de 45 femmes qui ont signalé des abus physiques lors de leur accouchement. Près de 100 femmes nous ont aussi raconté leurs histoires de violence verbale. Combien de femmes encore devront subir des mauvais traitements et craindre de demander des soins qualifiés au moment d’accoucher?

Les défis auxquels les travailleuses de la santé font face sont considérables. En Tanzanie, environ 50 % des postes dans le domaine de la santé ne sont pas pourvus, et les salles de travail et d’accouchement sont souvent petites, surachalandées et à court d’équipements. De plus, les dynamiques locales reliées au genre et au pouvoir portent ombrage aux travailleuses de la santé. Dans ce contexte, il est essentiel d’élargir l’accès à des soins de santé en matière de reproduction – y compris la planification familiale –, en particulier pour les adolescentes. Ces questions complexes méritent notre soutien et notre attention.

CARE maternal health care project in Tanzania

Dans le cadre du projet TAMANI, nous travaillons à améliorer les conditions et les compétences des travailleuses de la santé. Nous nous efforçons également de souligner l’importance d’offrir des soins respectueux, notamment en proposant de l’accompagnement et du mentorat qui évitent aux jeunes filles d’accoucher par terre. Nous travaillons avec la communauté pour aborder la dynamique inégale entre les sexes. Nous travaillons pour que les femmes et les filles aient plus facilement accès à des soins de santé et à de la planification familiale.

Aujourd’hui, à l’occasion de la Journée internationale de la santé et des droits maternels, je regarde mon Leo et ma Sadie et je me dis que nous sommes privilégiées de pouvoir recevoir des soins qualifiés qui respectent nos droits de femmes qui donnent la vie. Pour ma part, j’ai eu une accompagnatrice à la naissance que j’avais choisie, j’ai toujours été informée de ce qui se passait et j’ai donné mon consentement à tous les soins que j’ai reçus. Chaque femme mérite d’avoir droit à des soins qualifiés et respectueux.

Aujourd’hui, nous savons plus que jamais que les processus de maternité des femmes et des filles ont une incidence sur la réduction de la mortalité maternelle et néonatale. Malgré toutes les avancées que nous avons réalisées pour diminuer les risques des accouchements, nous ne parviendrons jamais à sauver des vies si les femmes et les filles craignent les personnes qui peuvent leur prodiguer des soins. C’est pourquoi il est essentiel de tenir compte de ce que veulent les femmes dans les programmes de santé maternelle et reproductive et de réaffirmer les droits de toutes les femmes et filles de vivre leur maternité en se sentant protégées et en recevant des soins empreints de respect et de dignité.


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