Lutter contre le coronavirus en Sierra Leone : L’histoire de Rosaline

Rosaline est infirmière en Sierra Leone. Elle travaille à l’établissement de santé de Kakoya, dans le district de Koinadugu, dont CARE est partenaire. Plus jeune, elle a été agente de santé communautaire bénévole pour CARE. Elle a utilisé son allocation mensuelle pour s’inscrire dans un programme d’études en soins infirmiers. Puis, en 2014-2015, elle a œuvré en première ligne pendant l’épidémie d’Ebola. Aujourd’hui, elle joue un rôle de premier plan dans la lutte contre la COVID-19 au sein de sa communauté.

À quoi ressemble la situation en Sierra Leone? Les gens sont-ils inquiets?

La situation n’est pas évidente. Il se passe beaucoup de choses en Sierra Leone. Nous, les infirmières, nous préparons au pire. Même les autorités traditionnelles redoublent de précautions devant les inquiétudes des conseillers. Il y a des cas suspects en Guinée, et ce sont nos voisins immédiats. Cette maladie suscite beaucoup de craintes.

Quelles sont les mesures mises en place?

Nous avons installé des stations de lavage des mains dans tous les lieux publics : locaux communautaires, écoles, établissements de santé, et j’en passe. Les gens évitent de se serrer la main. La plupart des rassemblements qui avaient lieu auparavant ont été annulés. Sorties dans les boîtes de nuit, matchs de football, fêtes, regroupements traditionnels, tout a été mis en veilleuse. Le pays est actuellement à l’arrêt. Nous axons nos interventions sur les protocoles de prévention et de contrôle des infections. Nous appliquons ces protocoles dans nos centres, portons des masques, évitons de toucher les patients, prenons leur température et nous lavons régulièrement les mains. Nous désinfectons chaque instrument et portons un masque même lors des accouchements. Pour le moment, nous misons sur la sensibilisation et la mobilisation de la communauté.

Comment faites-vous pour sensibiliser la communauté et gagner la confiance des gens?

Je parcours les rues à moto et m’assieds avec les gens pour leur parler de ce nouveau virus et leur expliquer comment s’en prémunir. Ils ne me croient pas toujours d’emblée, mais plus je leur donne d’explications, plus ils changent d’avis. Ils me font confiance parce que je viens de la région, que je suis née ici et qu’ils me connaissent. Ils se fient à ma parole quand je leur parle d’un sujet aussi grave.

Comment vous préparez-vous au coronavirus?

Nous nous apprêtons à mettre en œuvre nos protocoles de prévention et de contrôle des infections. Nous avons sorti nos équipements de protection individuelle. CARE nous a versé une petite somme, mais nous avons besoin de plus pour nous protéger. Nous nous attendons à recevoir des fonds bientôt du district, mais ce que nous avons actuellement n’est pas suffisant.

Rosaline, 29, is a nurse in Sierra Leone. CARE is a partner of the Kakoya health facility in Koinadugu district where she works. She is helping respond to the COVID-19 pandemic with CARE

Qu’est-ce qui vous inquiète? Quel serait le pire scénario selon vous?

Nous sommes inquiets parce que nous savons que nous serons touchés comme travailleurs de la santé. S’il y a des cas ici, en Sierra Leone, nous serons appelés en renfort. Or, nous sommes en contact direct avec les patients. Nous espérons que la maladie ne se propagera pas facilement, car elle peut être dangereuse.

Personnellement, je me fais du souci. Nous avons eu le virus Ebola il y a quelques années, et voilà que nous devons lutter contre un coronavirus. Notre bassin démographique n’est pas très vaste. Si le virus se propage, il ne restera plus grand monde… Nous ne savons pas non plus si nous allons recevoir une aide internationale, étant donné que la planète entière est aux prises avec la maladie. Il n’y aura peut-être pas assez de ressources pour nous aider à mener ce combat. La partie risque d’être difficile si le virus se répand ici. Cela nous cause beaucoup de soucis.

Qu’avez-vous appris d’Ebola qui pourrait être transposé à la pandémie actuelle?

Je travaillais dans cet établissement pendant l’épidémie d’Ebola. La première mesure de précaution à prendre – et la plus importante – est de se laver les mains. Il faut aussi hospitaliser les gens plutôt que de les garder à la maison. Pour l’instant, nous n’avons pas de matériel de prévention et de contrôle des infections. Il ne nous reste plus grand-chose d’avant, et la majorité de notre matériel est désuet.

En tant que travailleuse de la santé, je sais qu’il faut suivre les protocoles de prévention et de contrôle des infections : ne pas toucher les patients et, s’ils présentent des symptômes, les adresser aux ressources compétentes au sein du système de santé. Pendant l’épidémie d’Ebola, j’ai appris à quel point il était important de sensibiliser la communauté, d’informer chaque personne sur la maladie, et de savoir comment la reconnaître et la prévenir. On ne saurait jamais trop insister sur le lavage des mains. Chaque foyer doit avoir un endroit où se laver les mains; c’est primordial.

Quels conseils donneriez-vous aux travailleurs qui luttent contre la pandémie?

Bon nombre de travailleurs de la santé ont péri pendant Ebola. Mais si le coronavirus doit se propager en Sierra Leone, je pense qu’il fauchera moins de vies, car nous allons suivre les protocoles dès le départ.

Je vous conseillerais de prendre soin de vous, de penser d’abord à votre vie et à celle de votre famille, et de vous protéger. Ne vous précipitez pas vers les patients, suivez les protocoles et faites attention à vous.

Pourquoi choisissez-vous de travailler en première ligne et de lutter contre les épidémies?

J’ai décidé de travailler dans le domaine de la santé parce que la maladie a emporté mon père. Je voulais sauver des vies dans ma communauté.

Aidez CARE à répondre aux besoins des personnes frappées par la covid-19, dont les femmes et les jeunes filles qui sont touchées de manière disproportionnée par les situations d’urgence et les crises sanitaires.

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