UKRAINE : QUOI QU’IL ARRIVE, LYUDMYLA RESTERA POUR AIDER SES CONCITOYENS

Lyudmyla Yankina, 38 ans, bénévole à Kyïv. Crédit photo: Sarah Easter/CARE

UKRAINE : QUOI QU’IL ARRIVE, LYUDMYLA RESTERA POUR AIDER SES CONCITOYENS

La guerre fait rage en Ukraine depuis plus de 50 jours. Ce sont à ce jour 5 millions de personnes qui ont fui vers les pays voisins. Beaucoup ne peuvent toutefois se déplacer : les personnes âgées, les personnes handicapées et les personnes malades. Et c’est pourquoi Lyudmyla Yankina, comme plusieurs autres, ont décidé de rester.

Elle vit désormais dans un refuge d’urgence aménagé dans un sous-sol à Kyïv, capitale de l’Ukraine. La route qui mène à la ville est jalonnée de maisons détruites par les bombes et de chars d’assaut réduits en cendres.

Lyudmyla a dû fuir la région du Donbass en 2014. Pas aujourd’hui : « C’est assez. Je ne m’enfuirai plus. Je vais rester ici et aider les autres. »

« C’est assez. Je ne m’enfuirai plus. Je vais rester ici et aider les autres. »

Lyudmyla Yankina

Infirmière de formation, Lyudmyla s’est donné comme mission d’aider les gens vivant dans les zones qui ne sont plus approvisionnées. Elle y transporte de la nourriture, des médicaments et toutes sortes de provisions nécessaires.

« Je visite 200 personnes qui ont besoin de médicaments régulièrement. Beaucoup d’entre elles sont des personnes âgées qui sont seules au monde. Et beaucoup ont faim. J’ai rendu visite à une femme de 90 ans qui n’avait pas mangé depuis une semaine. Certains ont aussi un cancer et ont besoin de médicaments pour survivre », explique Lyudmyla.

Être un organisme de bienfaisance à soi tout seul

Au début, Lyudmyla payait de sa poche tout ce qu’elle apportait à celles et ceux dans le besoin. À court d’argent, elle a lancé un appel à l’aide sur Facebook, où elle amasse depuis de nombreux dons. Pour chaque don, elle fait le calcul dans sa tête : « 0,25 centime, c’est un sandwich. Avec 5 euros, je peux faire quelques kilomètres en voiture. »

Chaque jour, Lyudmyla doit parcourir entre 100 et 150 kilomètres pour venir en aide aux gens qui n’ont personne pour prendre soin d’eux. L’ouest de Kyïv a été complètement isolé, et il a souvent fallu plus de six heures à Lyudmyla pour traverser la ville. Les villages et banlieues en périphérie de la capitale sont aussi difficiles d’accès, car de nombreuses mines n’ont pas encore été désamorcées.

« Chaque jour, je prie pour que les missiles qui jonchent les routes n’explosent pas sur notre passage. Et chaque fois que je vois un immeuble effondré, je pleure, car je sais combien d’habitants sont enterrés sous les décombres. »

Des repas chauds pour des milliers de personnes

En partenariat avec des restaurateurs de Kyïv et d’autres bénévoles, Lyudmyla livre quelque 2000 repas par jour.

« Nous aidons les survivants. Les gens éclatent en sanglots quand nous leur apportons un repas chaud, car ils n’ont plus rien. »

À Kyïv, elle a déjà aidé 400 personnes, et dans les villages et les banlieues, ce sont plus de 1000 personnes qui ont bénéficié de son aide.

Avant que les gens puissent savourer leur repas chaud, Lyudmyla doit toutefois faire l’inventaire des besoins au quotidien.

« Je dois trouver les ingrédients, puis une cuisine pour préparer les repas, ainsi qu’un moyen de transport et de l’essence pour faire la livraison. Chaque jour, je me demande si j’achète de l’essence pour une ou deux voitures. Avec deux voitures, je nourris plus de gens, mais si je fais le plein pour une seule voiture, j’ai plus d’argent pour les repas. »

Beaucoup de personnes qui ont fui contactent Lyudmyla et lui disent qu’ils n’ont plus de nouvelles de leurs proches depuis des jours. Parfois, leur téléphone mobile leur a été volé ou encore ils vivent dans des zones sans électricité ni accès au réseau.

Une jeune femme a un jour envoyé à Lyudmyla les dernières coordonnées connues de sa mère. Pendant quatre jours, Lyudmyla n’a pu se rendre sur place, puisque les routes étaient truffées de mines. Quand elle a trouvé la mère, Lyudmyla a enregistré une vidéo pour l’envoyer à sa fille. Puis, elle a apporté à la femme des vivres, des générateurs, des chargeurs, une radio, un téléphone mobile, de l’essence et d’autres provisions dont elle avait besoin.

« Je lui ai demandé ce qu’elle aimerait manger, et elle m’a demandé si j’avais des biscuits. Puis, j’ai enregistré une vidéo d’elle s’adressant directement à sa fille. Je suis l’unique pont entre certaines familles. »

Faire le choix de rester

Or certaines personnes qu’elle trouve n’ont pas survécu. Lyudmyla a acheté 1000 housses mortuaires pour que les morts soient enterrés dans la dignité. Les cimetières étaient, jusqu’à tout récemment, des cibles d’attaques, et des usines à cercueils ont été détruites. Tous les jours, Lyudmyla note dans un carnet les noms des gens qu’elle veut trouver et de ceux à qui elle apporte médicaments et vivres.

Elle se rend dans des zones où les combats font rage, mettant ainsi sa vie en danger jour après jour.

« C’est moi qui ai décidé de rester. En tant qu’infirmière, je possède des compétences indispensables. Mes amis me disent de me mettre en sécurité, mais je ne peux m’imaginer laisser ces gens derrière. Si je tombe sur des gens qui n’ont pas mangé depuis une semaine, je peux les aider », souligne Lyudmyla.

Qu’est-ce qui l’anime?

« Je ne suis ni héroïne ni aventurière. J’ai toujours peur. Chaque jour pourrait être mon dernier. Nous avons besoin d’aide. Nous mourrons ici. »

Lyudmyla fait partie d’une légion d’Ukrainiennes et d’Ukrainiens qui, bénévolement, aident au quotidien celles et ceux dans le besoin. Elle espère que cette grande solidarité perdurera tout au long de la guerre.

« Pour l’avenir, je souhaite la paix. Pour moi-même, je souhaite ravoir un chez-moi un jour. »

En Ukraine, CARE vient en aide à plusieurs organismes partenaires qui ont fait leurs preuves en matière d’aide humanitaire et de coopération pour le développement. Les bénévoles comme Lyudmyla et les initiatives locales de petite envergure reçoivent une aide financière pour favoriser une assistance adaptée sur le terrain. De plus, CARE offre des refuges et des espaces sûrs pour les femmes et les familles, distribue de la nourriture, de l’eau et des produits d’hygiène et fournit des services psychosociaux et du soutien financier. Comme toujours, CARE tient compte des besoins des femmes, des jeunes filles, des enfants, des personnes âgées et des personnes handicapées. De concert avec ses partenaires, CARE viendra en aide à plus de 150 000 personnes dans les 6 prochains mois.

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