Conflit en Ukraine : cinq conséquences sur le sort des femmes et des jeunes filles

Des femmes fuyant l’Ukraine traversent la frontière dans la ville polonaise de Medyka, le 2 mars 2022. © Adrienne Surprenant/MYOP

Comme tous les conflits, la crise en Ukraine touche les femmes et les jeunes filles de manière disproportionnée tant à l’intérieur du pays qu’au-delà des frontières. CARE a décelé cinq répercussions majeures du conflit qui requièrent de toute urgence notre soutien et notre attention pour assurer le bien-être des femmes et des jeunes filles victimes de la crise.

Exploitation, violence et traite des personnes

Lorsque des populations doivent s’en remettre aux autres pour subvenir à leurs besoins essentiels, elles deviennent extrêmement vulnérables à différentes formes d’exploitation et de sévices comme la traite des personnes.

« Nous ne disposons actuellement que de preuves anecdotiques sur la traite des personnes, ce qui est préoccupant, affirme Delphine Pinault, coordonnatrice en défense des droits humanitaires au sein de CARE. Le manque d’information et de procédures permettant de tenir un registre et d’effectuer un suivi des Ukrainiennes et Ukrainiens qui rejoignent les pays voisins soulève de vives inquiétudes. Certes, il faut éviter les longues files d’attente aux frontières, mais un minimum de renseignements sur les migrantes et migrants (nom, sexe, âge) doit tout de même être recueilli aux postes frontaliers et dans les pays d’accueil. À défaut, on risque de voir encore plus de mauvais traitements infligés à des femmes et à des enfants déjà aux abois en raison de l’épuisement, du choc et du traumatisme. Nous nous inquiétons surtout de la traite des personnes visant les enfants non accompagnés et séparés de leur famille », poursuit-elle.

Risque de mortalité infantile et maternelle

On estime que 80 000 Ukrainiennes accoucheront dans les trois prochains mois, dont une majorité se trouve actuellement privée de soins de santé maternelle adéquats. De ce nombre, 12 000 auront sans doute besoin de soins obstétricaux et néonatals d’urgence pouvant sauver des vies. À l’échelle mondiale, ce sont 60 % des décès liés à la grossesse et à l’accouchement qui surviennent dans des contextes précarisés par des conflits politiques, des déplacements de population ou des catastrophes, comme c’est actuellement le cas en Ukraine.

« D’autres crises humanitaires nous montrent déjà l’impact dévastateur que peut avoir un long conflit, affirme Delphine Pinault. Au Yémen, par exemple, seule la moitié des établissements de santé sont pleinement opérationnels. Et à peine un établissement sur cinq propose des soins de santé maternelle et infantile. Résultat : on compte toutes les deux heures une mère qui meurt en couches. On craint fortement de voir une telle situation se produire en Ukraine si le conflit perdure. »

Traumatisme psychologique

On estime à 500 000 personnes le nombre de réfugiées et de réfugiés ukrainiens en Pologue qui souffrent de traumatisme – même si en réalité, les chiffres sont sans doute beaucoup plus élevés. Des familles entières ont été séparées, des citoyens ordinaires ont été forcés de prendre les armes et des millions d’enfants risquent d’être privés d’éducation si les écoles doivent fermer leurs portes en raison de l’enlisement du conflit.

« J’ai entendu tant d’histoires terribles et bouleversantes dans le cadre de mon travail auprès d’enfants ukrainiens réfugiés en Roumanie, indique Melinda Endrefy, psychologue spécialisée dans les interventions d’urgence au service d’Amurtel, un partenaire de CARE. Des mères m’ont raconté comment leurs bambins ont dû mûrir du jour au lendemain. Une fillette de sept ans qui participait à ma séance d’art-thérapie a sangloté pendant plus d’une heure après s’être dessinée au cœur de la guerre. Elle m’a remerciée par la suite en me disant que c’était la première fois qu’elle pouvait verser des larmes sur cette expérience. »

Tatiana Ganchou was displaced a first time during the Tchernobyl catastrophe, when she was a young girl living in Pripyat. "I can't sleep, I have panic inside. I am frightened that everything will happen again like in Tchernobyl, I have the same feeling I had then," she said. Adrienne Surprenant /MYOP Tatiana Ganchou a été déracinée une première fois lors de la catastrophe de Tchernobyl alors qu’elle vivait, jeune fille, à Pripyat. « Je n’arrive pas à dormir la nuit, je suis gagnée par la panique. J’ai peur de revivre Tchernobyl. Je me sens comme à l’époque », dit-elle. © Adrienne Surprenant/MYOP

Risques accrus de violence familiale

Le conflit en Ukraine soulève également un risque d’escalade de la violence sexiste tant chez les personnes qui sont restées au pays que chez celles qui l’ont fui. Même avant l’éclosion du conflit, une Ukrainienne sur cinq était victime de ce type de violence.

« Les conflits et les situations de crise font souvent monter les tensions au sein des familles, ce qui peut malheureusement se traduire par de la violence, des agressions et de mauvais traitements, explique Delphine Pinault. En pareille situation, nous avons tendance à oublier que les hommes et les garçons sont traumatisés eux aussi. Et c’est particulièrement vrai dans le cas de ceux qui ont été forcés de s’armer ou qui ont été témoins d’atrocités. Pourtant, dans la plupart des sociétés, les hommes doivent paraître forts et éviter de parler de ce qu’ils ressentent, sous peine de passer pour des faibles. »

On peut également observer les effets secondaires de cette violence dans les pays voisins, ce qui risque d’aviver les tensions. « L’analyse des relations entre personnes de sexe opposé que nous avons récemment menée dans le nord de la Syrie révèle une hausse alarmante du taux de violence sexiste, de harcèlement, de mariages d’enfants et de détresse psychologique, affirme Sherine Ibrahim, directrice nationale de CARE Turquie. La crise en Ukraine ayant déjà des répercussions dévastatrices sur le prix du pain et des denrées de base pour les familles syriennes, la situation ne peut que se dégrader pour les femmes et les jeunes filles. »

Famine

Les vivres sont l’un des principaux produits que l’on dit manquer dans les zones touchées par le conflit en Ukraine. De l’Égypte au Yémen, en passant par le Kenya et la République démocratique du Congo, la flambée des prix et les pénuries alimentaires déclenchées par la crise en Ukraine ont de graves répercussions sur les femmes et les jeunes filles. Déjà touchés par la famine avant le conflit, bon nombre de ces pays dépendent fortement des importations de blé et de pétrole provenant de l’Ukraine et de la Russie. Et comme dans toute crise alimentaire, ce sont les femmes et les jeunes filles qui mangent en dernier et qui doivent souvent céder leur repas en premier. Les conséquences du conflit ukrainien se font déjà sentir chez les femmes et les jeunes filles de pays comme la Somalie.

« Plus de 90 % de l’approvisionnement en blé de la Somalie provient de la Russie et de l’Ukraine, explique Iman Abdullahi, directrice nationale de CARE Somalie. La chaîne d’approvisionnement étant interrompue, nous redoutons ce qui se passera une fois les denrées actuelles épuisées. Nous constatons déjà une hausse du nombre de femmes et d’enfants affamés et dénutris qui se présentent dans les établissements de santé fixes et les points de service mobiles où nous sommes présents. »

De concert avec ses partenaires sur le terrain en Ukraine et dans les environs, CARE fournit des ressources d’urgence comme des vivres, de l’eau, des nécessaires d’hygiène, un soutien psychosocial et de l’argent liquide pour subvenir aux besoins courants. Nos interventions d’urgence visent à répondre en priorité aux besoins des femmes et des jeunes filles, des familles et des personnes âgées.

Votre don aujourd’hui aidera les familles restées en Ukraine et celles qui ont fui vers les régions limitrophes à obtenir un soutien et des services d’urgence.

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