L’histoire d’Aina : du conflit familial à la concrétisation de ses rêves

REGARDS CROISÉS DE JEUNES FEMMES SUR LA VIE À MADAGASCAR

 

À Madagascar, CARE a mis sur pied une collaboration avec Nofy Nandrianina Noelisoa Rajernerson, photographe professionnelle enseignant au centre résidentiel de réadaptation Akany Avoko Faravohitra (en anglais). Cet établissement offre aux jeunes filles une seconde chance, un espace de vie sécuritaire, des aptitudes fondamentales, et un soutien adéquat afin de leur permettre de surmonter les traumatismes du passé.

Nofy a demandé à trois de ses élèves* de documenter leur vie au centre, tout en racontant leur histoire.

Avertissement : ces témoignages évoquent des épisodes de violence, de deuil, de maltraitance infantile et de viol.

* Les prénoms de ces jeunes filles ont été modifiés.

Group of children jumping (black and white)

« J’ai 14 ans. Ma mère est morte quand je n’avais que cinq ans, et je me souviens de l’immense tristesse que j’ai alors ressentie. Puis, à mes 10 ans, mon père est décédé; j’étais en train de passer mes examens de fin d’études primaires.

Du vivant de mes parents, je me classais parmi les meilleures élèves de mon école. Mais au décès de ma mère, j’ai pris du retard sur mes camarades. Pour ne rien arranger, j’étais aussi victime de leurs moqueries. Ils me raillaient au sujet de la mort de ma mère et du handicap de mon père, qui s’est retrouvé avec le bras déformé à la suite d’un accident vasculaire cérébral.

À son décès, ce sont mes grands-parents qui nous ont élevés, mon petit frère et moi. Nous vivions ensemble, sous le même toit que mon oncle, ma tante et leurs enfants. C’est là que les problèmes ont commencé.

J’aimais beaucoup mes grands-parents, mais mon oncle nous réprimandait constamment, mon frère et moi. Il nous accusait de tous les maux : si un objet était cassé ou perdu, il nous faisait porter le chapeau. Souvent, il nous battait et nous injuriait. Il a même mis mon frère trois fois à la porte; je l’ai retrouvé en train de dormir sur le trottoir.

Moi, on m’a hospitalisée parce que je n’arrêtais pas de pleurer. Le médecin a dit que j’avais probablement une sorte de maladie du cœur. Et les choses ont continué ainsi pendant trois ans. C’est lorsque mon oncle m’a jetée dehors pour la troisième fois que je me suis résolue à partir. J’ai pensé à dormir dans la rue, mais le même jour, un garçon de ma connaissance m’a invitée à vivre avec lui et sa famille. On a fini par sortir ensemble au bout de quelque temps, mais cette relation a signé la fin de mes études : mes journées se résumaient à la cuisine et au ménage.

Après une vive altercation avec lui, j’ai décidé d’aller habiter chez une amie. J’ai finalement fait la rencontre d’un autre garçon de 17 ans, qui est devenu mon petit copain. Mais deux semaines plus tard, je suis tombée sur ma cousine, qui a essayé de me forcer à retourner dans ma famille. J’ai refusé, et elle a appelé la police. Nous avons alors été toutes les deux embarquées au poste, et j’ai été transférée au centre Avoko.

À mon arrivée, il a littéralement fallu me porter à l’intérieur, car je me débattais. Je n’ai accepté d’entrer que lorsque tante Hanta est intervenue pour me convaincre avec douceur. Au début, je pensais souvent à fuguer. Mais maintenant, tout ça est derrière moi, et je me sens bien ici. Ma vie a repris des couleurs. Au centre, on apprend des tas de choses différentes, comme la cuisine, le chant et l’artisanat. De plus, chacune d’entre nous mange à sa faim et a même droit à une collation. Mes grands-parents et mon petit frère me rendent souvent visite, et sont heureux chaque fois que je leur parle de mes progrès.

Je m’entends bien avec tante Hanta. C’est une personne d’une extrême gentillesse, à qui on peut facilement se confier. Elle est pour moi un véritable rayon de soleil, et je la considère comme ma mère. Une fois, je lui ai même dit que, quand je serai plus grande, je souhaitais suivre ses traces et ouvrir un centre pour venir moi aussi en aide aux autres.

Jusqu’ici, c’est cette formation en photographie que j’ai préférée. J’ai été très contente de pouvoir raconter à mes proches tout ce que j’y ai appris. Depuis, tante Hanta nous encourage à prendre des photos de chacune de nos activités au centre.

Ce ne sont pas les envies qui me manquent… Une fois adulte, j’aimerais être agent de bord, car j’adore voyager. Cette formation m’a aussi donné l’idée de devenir photographe professionnelle et de prendre des clichés des endroits que je visiterai et des personnes que je rencontrerai. »

AIDEZ AINA ET D’AUTRES JEUNES FILLES EXCEPTIONNELLES À RÉALISER LEURS RÊVES ET À FAIRE BOUGER LES CHOSES AU SEIN DE LEUR FAMILLE ET DE LEUR COMMUNAUTÉ.