Quatre façons dont la violence sexiste aggrave la crise alimentaire — et ce que vous pouvez faire pour contribuer à briser cette spirale

Les violences faites aux femmes et aux jeunes filles augmentent partout dans le monde

La part des violences sexistes a littéralement explosé durant la pandémie de COVID-19 et la crise alimentaire qui sévit en ce moment; les changements climatiques, la pénurie de ressources et l’inflation ne font qu’aggraver la situation. Cette violence trouve sa source dans l’inégalité entre les sexes – et si l’on ne s’attaque pas aux racines du mal, les femmes continueront à souffrir de la faim et à être exposées à diverses formes de brutalité.

Le nouveau rapport de CARE, intitulé Violence basée sur le genre et insécurité alimentaire, montre comment ces deux phénomènes sont inextricablement liés.

Notre expérience montre qu’en s’attaquant aux causes profondes de la violence sexiste, on favorise la sécurité des femmes et, ce faisant, leur accès aux moyens de production des denrées. En définitive, la famine à une moindre prise sur toute la communauté.

Notre travail dans le monde entier témoigne du cercle vertueux qui s’instaure quand les femmes et les jeunes filles se sentent à l’abri de la violence et sont traitées sur un pied d’égalité au sein de leur foyer et de leur communauté. Voici quatre des principales conclusions du rapport et les initiatives que prennent les femmes pour surmonter les difficultés vécues au sein de leur communauté.

Couples in Rwanda reflect on the impacts of unequal power dynamics in their relationships
Au Rwanda, des couples réfléchissent aux conséquences des inégalités de pouvoir au sein de leur ménage. Peter Caton, CARE.

1. En réduisant les risques, on facilite l’accès des femmes et des jeunes filles à la nourriture

Lorsqu’elles se trouvent aux points de distribution d’urgence, les femmes et les jeunes filles peuvent faire l’objet de harcèlement ou d’agressions, voire être forcées à échanger des rapports sexuels contre de la nourriture. Toutes ces menaces les empêchent d’accéder à des produits de première nécessité au moment où elles en ont le plus besoin. L’un des meilleurs moyens d’atténuer les risques est de libérer la parole des femmes et de les encourager à s’exprimer sur leurs difficultés.

En Ouganda, les femmes d’un camp de réfugiés devaient parcourir près de 10 kilomètres à pied pour se rendre au point de distribution alimentaire le plus proche. Cet éloignement augmentait le risque de violences et de harcèlement sexuels en chemin.

Woman sitting near a tree
Ensemble, Halatu et son groupe ont réussi à se faire entendre et ont permis aux femmes et aux jeunes filles de leur camp d’accéder à des produits alimentaires en toute sécurité. CARE Ouganda.

À la tête d’un groupe de femmes, Halatu a contribué à organiser un boycottage pacifique du point de distribution alimentaire, afin qu’il soit déplacé plus près du camp.

2. En s’attaquant aux causes profondes de la violence, on aide les femmes et les jeunes filles à mieux manger

Les dynamiques de pouvoir à l’origine de l’accès inégal des femmes à la nourriture par rapport aux hommes sont celles-là mêmes qui conduisent à la violence au sein des foyers. C’est donc dire qu’en s’attaquant aux causes profondes de la violence, on assure aux femmes et aux jeunes filles un accès équitable à la nourriture disponible.

Group of women gathered while leader reads
Kababush, chef du groupe d’analyse et d’action sociale de sa communauté, croyait que les adolescentes ne devaient pas consommer certains aliments comme les œufs et la viande. CARE Éthiopie.

Conformément à des croyances traditionnelles bien ancrées en Éthiopie, les parents de Simale pensaient que la consommation de certains aliments riches en protéines durant la puberté éveillait plus rapidement le désir sexuel chez les jeunes filles.

Le projet Abdiboru, qui vise à réduire la vulnérabilité des adolescentes, a permis d’engager au sein de nombreux villages une réflexion sur les préjugés et les tabous culturels dont elles sont victimes. Résultat? Grâce à ce travail de terrain, des jeunes filles comme Simale peuvent aujourd’hui mieux s’alimenter et rester scolarisées au lieu d’être mariées précocement.

3. En s’attaquant aux causes profondes de la violence, on aide les familles à mieux manger

Quand le risque de violence conjugale diminue, on constate que les familles sont moins touchées par la faim et plus à même d’obtenir une source décente de revenus. Au Rwanda, l’amorce d’un dialogue sur le pouvoir et le genre au sein de nombreux couples a permis de réduire de 55 % le risque de violence infligée aux femmes par leur conjoint.

Alphonsine and Augustin posing for the picture
Maintenant qu’Alphonsine a la liberté de travailler en dehors de son foyer, elle participe avec son mari Augustin aux dépenses alimentaires du ménage. Peter Caton, CARE.

Pour des couples comme Alphonsine et Augustin, le changement est majeur. Plutôt que de se disputer au sujet de l’argent ou des biens, ils travaillent désormais ensemble et font front commun pour surmonter les difficultés que posent notamment la sécheresse et la hausse du prix des denrées alimentaires.

« Heureusement, mon mari me permet désormais de sortir et de travailler parce qu’il a compris la valeur de mon apport au ménage. Comme je suis libre d’exercer des activités plus rémunératrices, mes revenus ont progressé. »

Alphonsine estime que son ménage gagne aujourd’hui près de 40 % de plus.

Selon Augustin, la formation suivie avec sa femme quatre ans auparavant a influencé la logistique des repas familiaux.

« Plutôt que de réduire les portions, nous avons choisi de participer chacun à notre tour aux dépenses alimentaires, explique-t-il. J’assume généralement les coûts du dîner et ma femme ceux du souper. »

En raison de la flambée des prix des denrées alimentaires, ils ont dû réduire leur consommation de viande, mais Alphonsine peut continuer à savourer chaque jour son plat préféré : les Irish potatoes.

4. En s’attaquant aux causes profondes de la violence sexiste, on aide tout le monde à mieux manger

Lorsque des hommes comme Augustin travaillent avec leur épouse sur un pied d’égalité, ils sont moins susceptibles de cautionner la violence. Leur ménage est aussi en mesure de produire davantage de nourriture.

À Gitega, au Burundi, la sensibilisation à l’égalité des sexes offerte à des familles dans le cadre d’une formation agricole s’est en effet accompagnée d’un doublement de la production de riz. Grâce à l’augmentation des rendements, les femmes n’ont pas seulement eu de quoi manger : elles ont également pu vendre du riz à d’autres, ce qui a facilité l’accès à la nourriture de toute la communauté.

Parallèlement, la proportion d’hommes participant au projet qui rejettent tout recours à la violence dans le cadre familial a elle aussi doublé. C’est encore une fois la démonstration que la promotion de l’égalité des sexes permet aux femmes d’être plus en sécurité et de mieux s’alimenter.

Community in Burundi gathered for training on gender equality and agriculture
Au Burundi, les membres de cette communauté ont suivi une formation sur l’agriculture et l’égalité des genres. Irene Nduwayezu/CARE

Vous voulez en savoir plus sur les liens entre insécurité alimentaire et violence sexiste? De plus, vous vous demandez pourquoi CARE pense que la promotion de l’égalité des sexes est la meilleure façon de protéger les femmes des violences et de répondre à la crise alimentaire mondiale?