7 choses à savoir à propos de la situation humanitaire à Gaza

Depuis plus de deux mois, les bombes pleuvent sur la population de Gaza, un véritable « enfer sur terre ». La migration forcée, la faim, l’absence de soins médicaux, la pénurie d’eau potable et l’arrivée de l’hiver mettent à rude épreuve les enfants et les familles. Un nombre affolant de personnes – 1,9 million – ont dû fuir leur domicile. Au moins 18800 personnes ont été tuées. Le ministère de la Santé n’a pu mettre à jour le bilan dans les derniers jours et de nombreux corps ensevelis sous les décombres n’ont pu être dénombrés. Quelque 51 000 personnes ont été déclarées blessées et des milliers d’autres manquent à l’appel.

Nous avons réuni ici sept faits qui vous aideront à y voir plus clair quant aux effets de cette guerre sur les Palestiniennes et Palestiniens de Gaza.

 

1. Il s’agit du conflit le plus meurtrier au monde pour les enfants

En temps de guerre, ce sont souvent les mamans et leurs enfants qui sont les plus touchés par les combats. Les hostilités dans la bande de Gaza ont été particulièrement dévastatrices pour les enfants : en moyenne, plus de 110 enfants ont été tués chaque jour depuis le 7 octobre. En tout, plus de 7 700 enfants auraient été tués, soit 40 % des victimes signalées. C’est plus que pour tous les grands conflits mondiaux réunis en 2022.

 

2. Les familles n’ont plus de toit

Depuis le 7 octobre dernier, 1,9 million de personnes, c’est-à-dire près de 85 % de la population, ont dû fuir leur domicile, désirant échapper à tout prix à la violence et à la destruction et trouver de quoi subvenir à leurs besoins fondamentaux. La plupart ont dû se déplacer à plusieurs reprises, dont Alaa et ses enfants. « C’est notre quatrième refuge depuis le début de la guerre. »

 

Depuis que j’ai vu leurs petits visages pour la première fois, tout ce que j’ai toujours voulu, c’est assurer leur sécurité et veiller à leur santé. Maintenant, la seule chose que je peux faire, c’est leur dire de courir plus vite.

– Alaa.

La plupart des gens n’ont plus de chez-soi. En effet, on estime qu’environ 60 % des maisons à Gaza ont été endommagées ou détruites. En novembre, pendant les sept jours de trêve, notre collègue Saaed, coordonnateur de l’aide humanitaire d’urgence de CARE à Gaza, a discuté avec un ami qui a pu aller vérifier l’état de sa maison dans la ville de Gaza.

« Il m’a dit que les frappes aériennes avaient détruit notre maison. J’ai le cœur serré quand je pense au fait que l’endroit où nous avons élevé notre famille pendant de si nombreuses années a été réduit en poussière. Nous avons tout perdu. »

Près de 1,3 million de Palestiniennes et Palestiniens vivent désormais dans les 155 refuges de l’UNRWA. Les refuges situés au centre et dans le sud de Gaza, là où ont fui la majorité des gens devant l’avancée des opérations militaires, accueillent en moyenne quatre fois leur capacité. Les gens n’ont ainsi plus d’intimité ou ne peuvent préserver leur dignité, et on y constate une hausse du risque de violence fondée sur le genre et d’exploitation et de violences sexuelles à l’égard des femmes et des jeunes filles. Certaines personnes ont trouvé refuge chez des membres de leur famille et vivent souvent à 30 dans de petites maisons. De plus en plus de familles installent des tentes dans des espaces découverts, tandis que d’autres ont tout perdu et n’ont d’autre choix que de dormir dans la rue.

À la fin de la trêve, les bombardements ont repris de plus belle.

« On nous a dit de fuir parce que notre quartier serait touché par des frappes aériennes, mais nous ne savons pas où aller. Il n’y a nulle part où aller », nous a rapporté notre collègue Salwa.

Les endroits épargnés par le conflit disparaissent à vue d’œil et n’offrent généralement pas le nécessaire pour survivre : nourriture, eau, toit et installations sanitaires. Il n’y a plus d’endroit sûr à Gaza, ni même d’endroit où vivre.

Un enfant est assis dans une voiture partiellement détruite que sa famille utilise en guise d’abri dans le camp de réfugiés de Nuseirat, à Gaza. Grayscale Media, 2023/CARE
Un enfant est assis dans une voiture partiellement détruite que sa famille utilise en guise d’abri dans le camp de réfugiés de Nuseirat, à Gaza. Grayscale Media, 2023/CARE

3. L’éducation n’est plus qu’un rêve oublié

Près de la moitié des 2,3 millions de personnes vivant à Gaza ont moins de 18 ans.

Aucun de ces enfants ne peut poursuivre sa scolarité, et nombre d’entre eux sont obligés d’utiliser les écoles en guise de refuge. Qui plus est, 70 % de tous les bâtiments scolaires, soit 342, ont été endommagés par les combats, y compris ceux qui hébergeaient des familles. Au lieu de s’amuser ou d’aller à l’école, les enfants aident leurs parents à trouver de quoi survivre tout en composant avec le traumatisme d’avoir perdu des proches.

« L’éducation n’est qu’un rêve oublié pour ces enfants, qui craignent que chaque jour soit leur dernier, » souligne Aaron Brent, directeur national par intérim de CARE en Cisjordanie et à Gaza.

« Les traumatismes psychologiques atteignent des sommets inégalés. Des mères nous disent que leurs enfants ne parlent ou ne mangent plus en raison des horreurs qu’ils ont vues et vécues. D’autres pleurent et crient chaque fois qu’ils entendent des bruits forts. »

Bien avant cette guerre, les 15 années de blocus et de conflit ont eu des conséquences désastreuses sur le bien-être psychologique des enfants de Gaza. CARE et d’autres organismes humanitaires craignent que la vie de toute une génération d’enfants soit dictée par la peur, la détresse et le deuil.

Un Palestinien déplacé en raison des bombardements israéliens sur la bande de Gaza se tient dans un camp de tentes à Khan Younis, dans le sud de la bande de Gaza. © Grayscale Media, 2023/CARE
Un Palestinien déplacé en raison des bombardements israéliens sur la bande de Gaza se tient dans un camp de tentes à Khan Younis, dans le sud de la bande de Gaza. © Grayscale Media, 2023/CARE

4. Gaza est complètement défigurée par la destruction des infrastructures

En tout, 60 % de la bande de Gaza a été rasée.

Des maisons, des hôpitaux, des écoles et des infrastructures essentielles, comme des réseaux d’aqueduc, des installations sanitaires et des moulins à grains, ont été détruits ou endommagés. Seuls 8 des 36 hôpitaux et installations médicales sont partiellement opérationnels, et au moins 286 travailleuses et travailleurs de la santé ont été tués. Depuis plus de deux mois, la bande de Gaza est privée d’électricité, et les réserves de combustible de son unique centrale électrique sont épuisées.

« Notre équipe a parlé avec des médecins qui doivent faire des césariennes sans anesthésie et ont vu des mères perdre leur nouveau-né après l’accouchement faute d’électricité pour faire fonctionner les incubateurs qui les garderaient en vie », explique Hiba Tibi, directrice régionale adjointe par intérim de CARE au Moyen-Orient et en Afrique du Nord.

Des dizaines de milliers de personnes blessées et 180 mères qui accouchent chaque jour ne reçoivent pas les soins médicaux dont elles ont besoin. Les services de soins intensifs des quelques hôpitaux toujours fonctionnels accueillent deux fois plus de patients et de patientes qu’à l’habitude. De plus, des milliers de personnes déplacées trouvent aussi refuge dans les hôpitaux.

Des maisons du quartier d’al-Rimal, à Gaza, ont été détruites par plusieurs frappes aériennes. Grayscale Media,/CARE
Des maisons du quartier d’al-Rimal, à Gaza, ont été détruites par plusieurs frappes aériennes. Grayscale Media,/CARE

5. Des menaces silencieuses planent

Les missiles et les frappes aériennes ne sont pas les seuls tueurs à Gaza. La malnutrition, le froid, la pénurie d’eau potable et l’insalubrité causés par le siège forment une combinaison mortelle.

CARE a déjà constaté une rapide propagation de maladies qui infectent et tuent les personnes ayant survécu aux bombardements. Quantité de gens doivent boire de l’eau impropre à la consommation. La déshydratation et les maladies d’origine hydrique sont une menace grandissante, surtout pour les personnes qui vivent dans des tentes de fortune en plein air. Dans de telles conditions, la maladie pourrait faire plus de victimes que les bombes. Les cas de diarrhée, de varicelle et de gale sont en hausse et menacent tout particulièrement les jeunes enfants qui n’ont pas accès à des médicaments et vivent dans d’horribles conditions sanitaires. Enfin, en raison des nuits froides et des pluies fortes qui détrempent les vêtements et les matelas, l’hypothermie devient un ennemi mortel pour les plus petits.

 

« L’absence de soins médicaux, l’insalubrité et la grande malnutrition qui caractérisent les refuges surpeuplés forment un mélange dangereux, et nous craignons de voir augmenter le nombre de femmes et d’enfants qui meurent de maladies évitables et traitables. »

 

-HIBA TIBI, DIRECTRICE RÉGIONALE ADJOINTE PAR INTÉRIM DE CARE AU MOYEN-ORIENT ET EN AFRIQUE DU NORD

6. La famine est un risque bien réel

Selon le Programme alimentaire mondial, il y a un risque élevé de famine, et les cas de déshydratation et de malnutrition se multiplient rapidement. La situation s’est détériorée depuis la fin de la trêve : des milliers d’autres personnes doivent fuir vers des secteurs qui n’ont pas assez de nourriture et d’eau pour assurer leur survie. Près de la moitié des personnes déplacées affirment se coucher le ventre vide, et 44 % font état d’une faim extrême. Notre collègue Salwa nous a dit qu’elle et sa famille se nourrissaient d’aliments en conserve et avaient fait la file des heures durant pour acheter du gaz pour cuisiner. Les prix des aliments explosent et les familles n’ont pas les moyens d’acheter des produits frais, si tant est qu’ils soient sur les étalages. 

7. Les organismes d’aide ont les mains liées, et des travailleuses et travailleurs humanitaires meurent chaque jour

Avant le 7 octobre, environ 500 camions acheminant de l’aide humanitaire et des produits commerciaux entraient dans la bande de Gaza chaque jour. Maintenant, seules quelques douzaines de camions sont autorisés à pénétrer dans l’enclave alors que les besoins humanitaires ont atteint un niveau jamais vu. Étant donné la pénurie de carburant, les interruptions de communication et les bombardements incessants, il est difficile, voire impossible, de faire parvenir l’aide à celles et ceux qui en ont besoin. En outre, plus de 135 travailleuses et travailleurs humanitaires ont été tués depuis le 7 octobre.

Seul un cessez-le-feu immédiat et à long terme permettra aux organismes humanitaires de commencer à agir à l’égard de cette catastrophe sans précédent et à sauver les milliers de vies qui sont en danger.